Inconnu du grand public jusqu'aux hostilités déclenchées dimanche matin, le Haut-Karabakh est une région montagneuse dénuée de ressources, rattachée à l'Azerbaïdjan sous l'époque soviétique quoique peuplée presque exclusivement d'Arméniens
Les images du front parlent d'elles-mêmes. Entre les armées azéries et arméniennes, depuis ce week-end au Haut-Karabakh, enclave d'à peine 150.000 habitants grande comme deux régions françaises, c'est le retour aux guerres d'antan .
Bakou et Erevan recourent aux chars, batteries de missiles et artilleries. Leurs troupes sont terrées dans des tranchées qui rappellent celles de Verdun en 1916. Avec, bien en vue au bout des jumelles et des viseurs : la ligne adverse, à 300 mètres. Dans ces galeries enfouies à deux mètres de profondeur dans la terre séchée, entre les postes de tir et sous les barbelés, les troufions des deux camps sont en treillis de camouflage, mêmes casques sur la tête et vielles Kalachnikov à l'épaule. Avec, ici et là, de vieux stocks soviétiques de lance-roquettes et fusils de snipers
Jeu russe ambigu
Ces fronts azéris et arméniens ont un autre point commun : ces vieilles armes viennent de Russie. Depuis des années, Moscou arme en effet les deux camps. Le Kremlin n'a pas intérêt à un nouvel embrasement, mais est soupçonné d'entretenir le statu quo pour satisfaire les appétits commerciaux de son complexe militaro-industriel et conserver son pouvoir de nuisance dans la région. Le Haut-Karabakh n'est qu'un des « conflits gelés » nés du démantèlement de l'Union soviétique il y a déjà trente ans, avec ceux d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud en Géorgie et de Transnistrie en MoldavieFormellement, la Russie est pourtant avant tout l'alliée de l'Arménie, tenue par l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), dont tous deux sont membres, de la soutenir en cas d'agression militaire de Bakou. Mais, depuis le conflit de 1988-1994 q ui a fait 25.000 morts entre Azéris et Arméniens pour le contrôle du Haut-Karabakh, le puissant voisin joue sur les deux tableaux. D'autant plus que, au-delà du commerce d'armes, il entretient d'étroites relations avec les deux ex-républiques soviétiques.
Vote massif pour l'indépendance
Sous l'URSS, le Haut-Karabakh (ses habitants utilisent désormais le nom d'Artsakh) a été rattaché dès 1921 à l'Azerbaïdjan mais, après la chute de l'empire soviétique, les habitants ont massivement voté pour l'indépendance. Un statut de façade qui, soutenu militairement et financièrement par l'Arménie, n'a depuis été reconnu par aucun Etat, pas même par Erevan. Depuis le cessez-le-feu de 1994, la minuscule mais superbe région montagneuse, avec ses 150.000 habitants très majoritairement Arméniens, reste revendiquée par Bakou